"Départ à 4 h 1/2 - nous occupons une tranchée à l'est de Fresnes-en-Woëvre 1 bombardé - vers 3 h du soir je reçois le baptême du feu - une bonne demi-douzaine d'obus éclatent sur nos tranchées et un éclat tombe à 10 cm de ma tête, me la couvrant de terre. Comme il est trop lourd, j'en ramasse un autre morceau. A 3h attaque de la cote 233 2. Je prends le commandement de la section - serre la main à Raveton au passage - la fusillade dans la nuit, le clair de lune - le bourdonnement de mouches de balles. Nous bivouaquons à 10 h 1/2 du soir dans un champ de blé à 400 m de Fresnes après avoir mangé un peu de viande de conserve avec du pain récemment touché et de l'eau de vie. A minuit, réveillé par les balles et le froid. Un froid glacial - rosée blanche. Les hommes harassés dorment en se plaignant. A 2 h je me lève pour faire creuser une tranchée par une équipe de 9 hommes qui se met courageusement au travail - distribution de 120 cartouches par homme - à 4 h marche en avant."
1 - Fresnes-en-Woëvre : bourg situé à une vingtaine de kilomètres à l'est de Verdun, voisin des villages de Riaville, Pintheville, Manheules, Haudiomont, lieux de cantonnement de Pergaud au retour des tranchées.
2 - La cote 233 : les assauts de la cote 233 de Marchéville font partie de la stratégie visant à "pincer la hernie de Saint-Mihiel" ; mais les tranchées allemandes sont fortifiées de blockhaus en béton, encore en place aujourd'hui, protégeant les mitrailleuses. Pergaud reçoit son baptême du feu là même où il disparaitra six mois plus tard.